Les vagues de Noé Soulier, Théâtre national de la danse de Chaillot.
Cette dernière création de Noé Soulier poursuit
le sillon qu’il creuse depuis ces précédentes pièces sur la question du geste
et sa décontextualisation. Ici et encore plus qu’avant, à partir d’indications
motrices telles que lancer, éviter, frapper, etc., mais en en retirant toute finalité,
le geste devient un pur geste chorégraphique et ne se référence plus que de lui-même,
sans but pratique, en gardant toute son énergie, sa trace kinesthésique pour
ainsi dire et sa capacité à activer en retour la mémoire des expériences
propres du spectateur. Sur scène, 6 interprètes sautent, esquivent,
propulsent des parties de leur corps, tombent et roulent au sol ensemble ou
séparément, et expérimentent avec un réel engagement physique de multiples formes
d’agencement et d’interaction à partir des quelques indications motrices
évoquées plus haut.
Accompagnés
de 2 percussionnistes de l’ensemble Ictus, les danseurs occupent un plateau dépouillé
de tout artifice hormis les instruments placés sur le côté. Les sons des
percussions donnent à la pièce une certaine sensualité. L’écriture de la
partition à laquelle a participé le chorégraphe suit le même processus que la chorégraphie :
une structure commune qui permet aussi l’improvisation. « Nous chorégraphions
la musique comme nous composons la danse". On pense un peu à Anne Teresa
de Keersmaeker dont on connaît par ailleurs la grande proximité avec l’ensemble
Ictus. Et le tableau final est particulièrement réussi qui voit s’interrompre
les musiciens alors que les danseurs parcourent encore le plateau, variant les
agencements et les figures, avec une énergie débordante.