Structure Souffle de Myriam Gourfink dans l’écrin de la Sainte Chapelle.
Myriam Gourfink présentait sa dernière création Structure Souffle, pièce pour 8 interprètes, dans le cadre exceptionnel de la Sainte Chapelle du Château de Vincennes grâce au partenariat du Festival d’Automne avec l’Atelier de Paris et le Centre des Monuments nationaux. A la majesté du lieu, il faut ajouter une visibilité idéale pour des spectateurs répartis sur un seul rang tout autour du vaste espace central de la chapelle laissé vacant, là où évolueront les 8 danseuses.
Faire corps commun.
Au début est une déflagration sonore puissante remplissant l’espace et annonçant l’entrée des huit interprètes qui se regroupent sur un espace restreint non loin de l’autel. Elles restent quelques minutes ainsi immobiles et séparées avant d’établir un premier contact physique, “une accroche” dit la chorégraphe : la main de l’une se pose sur le bras de l’autre, un coude se connecte à un dos, etc., selon un ensemble de modalités et de lieux du corps définis à l’avance à partir des danses de couple.
Ces connexions établies, le voyage peut alors commencer, celui des danseuses tout d’abord qui se déplacent dans une extrême lenteur mais également celui du spectateur qui assiste pendant plus d’une heure à la recomposition permanente de ce paysage mouvant de corps tenus les uns aux autres par des rapports de poids et de contre-poids, dans un équilibre fragile et toujours incertain, moteur d’un déplacement à peine perceptible.
A rebours d’une danse qui repose sur la dépense physique, Myriam Gourfink creuse son sillon du côté de la lenteur depuis longtemps maintenant en s’appuyant sur un outil essentiel dans son travail : le yoga et le souffle. Avec cette création, le groupe tout entier devient comme un grand poumon, constitué de ses multiples alvéoles individuelles, qui au rythme du souffle des unes et des autres s’élargit ou se rétracte.
Une éloge du temps.
C’est à une autre expérience du temps que nous somme conviés comme spectateur, un temps incompressible qui n’aurait plus début, ni fin. Un temps suspendu qui nous fait nous demander incessamment ce qui a pu bouger dans ce corps collectif présent devant nous, ce qui a mué, s’est transformé à notre insu. Car à peine notre regard fait-il le point quelques instants sur un détail, une main, un genou, et notre retour à une vision d’ensemble ne reconnaît déjà plus rien du paysage précédent disparu. Ainsi en est-il de l’impermanence du temps.
Mais comme le voyage doit s’achever, c’est dans une séparation progressive qu’il s’opère. Les 8 danseuses se détachent les unes des autres, les yeux clos, gardant du contact précédent disparu comme une résonance alors que le dernier son, produit en live par Kasper T. Toeplitz, fidèle compositeur et accompagnateur musical de la chorégraphe, s’épuise dans un dernier souffle qui n’en fini pas de s’éteindre.
Une fin d’une très belle et touchante simplicité, comme un point de suspension qui nous a presque fait effleurer du doigt, à notre tour, une idée de l’éternité, dans cette chapelle bâtie précisément à cette fin.
Structure Souffle :
Composition chorégraphique, Myriam Gourfink.
Composition musicale et interprétation live, Kasper T. Toeplitz
Interprètes : Alexandra Damasse, Céline Debyser, Karima El Amrani, Carole Garriga, Deborah Lary, Azusa Takeuchi, Véronique Weil, Annabelle Rosenow
Structure Souffle de Myriam Gourfink vu le 16/09/2021 à la Sainte Chapelle du Château de Vincennes.
Le site de Myriam Gourfink
