Guintche de Marlene Monteiro Freitas

  • Post category:chroniques

Guintche ou les mille portraits de Marlene Monteiro Freitas.

Le portrait que consacre le festival d’Automne à Marlene Monteiro Freitas, danseuse et chorégraphe capverdienne, s’est ouvert avec le solo Guintche, pièce de 2010, dans une version live accompagnée de deux percussionnistes.

Guintche de Marlene Monteiro Freitas
Guintche © José Caldeira

Guintche est en créole comme un mot valise qui désigne tout à la fois “un oiseau, le nom d’une prostituée ou, qui sait, une attitude”. Ce solo est une belle porte d’entrée aux sept autres pièces programmées par le festival. Marlene Monteiro Freitas y déploie tout son goût pour l’hybridation et son talent hors pair pour une forme de “transformisme”, deux constantes que l’on retrouve dans ses autres pièces.

Avec Guintche, elle entre sur le plateau comme sur un ring de boxe, un peignoir sur le dos, prête à en découdre. Derrière elle pend un sac de frappe comme on en trouve dans les salles d’entrainement. Elle s’installe au centre de ce ring métaphorique avec la fragilité d’un oiseau tombé du nid et n’en bougera pas durant une bonne demi-heure entrainant le spectateur dans un monde de turbulences et d’invocations archaïques, entre fascination et répulsion, tout à la fois femme fantasque et animal totémique ondulant du bassin avec frénésie au rythme de percussions endiablées. Et il faut dire que ça frappe fort avec Simon Lacouture et Henri Lesguiller les deux percussionnistes placés de part et d’autre du plateau. 

Figure hybride et extravagante aux lèvres démesurées maculées de rouge sang et les yeux exorbités, sorcière aguicheuse et repoussante, personnage grotesque de carnaval, créature possédée aux mains gantées tour à tour griffes, masques, avalées et recrachées, la chorégraphe nous convie à un monde mouvant tel un flipbook halluciné au rythme de ses transformations corporelles.

La chorégraphe nous fera sortir de ce rêve éveillé en réintégrant un corps plus “conforme”, celui d’une gymnaste, dont il ne semble pourtant rester que des stéréotypies corporelles, comme une autre forme de possession. 

On ne saurait trop conseiller de voir ou revoir les pièces de cette chorégraphe dans le cadre de la programmation du festival d’Automne. La prochaine pièce, Idiota se donnera au Palais de la Porte Dorée à la fin du mois d’octobre.

Avec Marlene Monteiro Freitas, Simon Lacouture et Henri Lesguiller aux percussions.

Guintche de Marlene Monteiro Freitas vu le 30/09/2022 au Centre Pompidou dans le cadre du festival d’Automne.


A propos des créations de Marlene Monteiro Freitas, on pourra lire les articles suivants :
D’ivoire et chair les statues souffrent aussi, Bacchantes. Prélude pour une Purge, Mal – Embriaguez Divina